Il est environ 17 h 30, ce mercredi 12 mars 2025, lorsqu’un homme Ă bord de sa Mercedes tente d’embarquer un enfant de moins de cinq ans Ă l’arrière de son vĂ©hicule Ă Bassinko, un quartier situĂ© Ă la sortie nord de Ouagadougou dans l’arrondissement 8. Les pleurs de l’enfant attirent immĂ©diatement l’attention du voisinage, notamment de sa mère. PaniquĂ©e, celle-ci s’agrippe Ă la portière pour empĂŞcher le dĂ©part. Mais l’homme la repousse violemment avant de dĂ©marrer en trombe.
L’alerte est aussitôt donnée. Cependant, l’individu ne parvient pas à s’éloigner, car à quelques mètres se trouve un bas-fond, où la manœuvre ne peut se faire qu’à très faible vitesse. Cette contrainte permet aux habitants du quartier d’intercepter le véhicule et d’extirper le conducteur.
À l’arrière de la voiture, l’enfant, torse nu, apeuré, est en larmes. La colère gagne rapidement la foule. Certains, armés de cailloux, de bâtons, de cordes et de machettes, veulent en découdre avec l’individu, convaincus d’avoir affaire à un kidnappeur. D’autres tentent de calmer la situation et parviennent à joindre la gendarmerie de Yagma.
L’homme est interrogé sur place. À la stupéfaction générale, il s’agit d’un haut gradé des forces de sécurité, un ancien gouverneur de région. Les questions fusent pour tenter de comprendre les raisons de son acte. L’individu, dont nous tairons le nom, explique que des enfants auraient lancé des projectiles sur son véhicule. Ayant reconnu l’un d’eux, il aurait décidé de l’embarquer pour le remettre aux autorités.
Un récit qui peine à convaincre la foule. « Pourquoi embarquer un enfant de moins de cinq ans dans un véhicule, bousculer sa mère au sol, alors qu’il aurait pu s’adresser directement aux parents pour régler la situation ? » s’interrogent certains habitants.
Persuadés qu’il s’agit d’un enlèvement à des fins mystiques, plusieurs personnes tentent de lyncher l’individu. La mère de l’enfant, encore en pleurs et sous le choc, arrive sur les lieux avec d’autres femmes, proférant des injures. L’atmosphère devient de plus en plus tendue.
Un membre des forces de sécurité résidant dans le quartier intervient et affirme reconnaître l’homme. Il le présente comme un colonel.
La gendarmerie arrive enfin, près d’une heure après l’interpellation. Elle s’apprête à menotter l’individu, mais change soudainement d’avis, probablement en raison de son grade. Un geste qui attise davantage la colère des habitants. Alors que les gendarmes avaient initialement placé l’homme au volant de son propre véhicule pour l’emmener au poste, ils se retrouvent rapidement débordés par la foule. Face à la pression, ils finissent par le menotter et le placer à l’arrière de leur véhicule.
Les parents de l’enfant ainsi que les témoins sont priés de se rendre à la gendarmerie le lendemain pour être entendus. Le véhicule du suspect sera également conduit au poste plus tard.
La foule finit par se disperser. Certains se disent soulagés que l’individu soit entre les mains des forces de l’ordre. D’autres, convaincus qu’il s’agit bien d’un kidnappeur, restent persuadés que son grade et son influence lui permettront d’échapper à toute sanction.